mercredi 13 décembre 2006

Après la grève, la répression

Sentant monter le mécontentement dans la région, le préfet PORTE, qui s’appuie sur le décret-loi du 29 novembre 1939 et son arrêté du 2 décembre 1940, (qui prévoit l’internement sans que la participation à un acte répréhensible puisse être imputée), décide de l’internement, le 2 janvier 1941, à Saint Paul d’Eyjeaux, de :
- Charles BELIDON, délégué mineur pour les mines de Saint-Hilaire et du Méglin est arrêté le 7 janvier 1941. Il est interné à Nexon, bien qu’il ait pris soin de se tenir hors de la grève
- Jean Baptiste VIRLOGEUX, retraité mineur à Buxières-les-Mines, arrêté le 15 janvier 1941, interné à Nexon, bien que sans lien avec la grève. Ils seront déportés dans les camps d’Afrique du Nord.

Le 8 février, les gendarmes de Noyant arrêtent Léon LAJARGE qui est né en 1902, à Buxières où il a passé sa jeunesse et où il a côtoyé Fernand VIRLOGEUX, son cadet de quelques années. Avant la guerre, il travaille à Montluçon, aux usines Dunlop, où il est connu comme un militant communiste. Au mois de décembre, il est embauché à la mine de Saint-Hilaire. Il va aider Fernand lors des prises de parole au fond de la mine. C’est lui qui va être chargé de transmettre les revendications des mineurs à la direction, à savoir : augmentation des salaires, pas de travail le dimanche, augmentation des rations alimentaires.

Fernand VIRLOGEUX est arrêté le 9 février, voici son témoignage :
« J’ai été arrêté, le 9 février 1941, par les gendarmes du Montet. (Les gendarmes, bons bougres, m’ont laissé dormir une nuit de plus à la maison), ainsi que Lucien LEPE, de la mine du Méglin, que la direction considère comme un meneur ».
Ils sont conduits, tous les trois, par la maréchaussée, au camp de Nexon où Fernand retrouve son père.
Léon LAJARGE sera libéré du camp de Saint Paul d’Eyjeaux, le 5 décembre 1942. Il est assigné à résidence à Montluçon, il travaillera dès janvier 1943 à la société Air Liquide.
Lucien LEPE sera libéré du camp de Nexon en avril 1942 et reprendra son travail à la mine.
Fernand VIRLOGEUX sera déporté dans les camps d’internement en Algérie et ne rentera en France que fin décembre 1944.
Les patrons des mines espèrent que ces arrestations vont créer un climat de soumission parmi les mineurs. C’est mal les connaître car, le 18 août 1941, une nouvelle grève éclate au puits du Plamores, à Buxières-les-Mines. Les mineurs veulent des meilleures conditions d’hygiène (des douches à la sortie du travail). Elle entraîne l’arrestation, le 27 août, d’Antoine BERNADAT, délégué mineur et d’Henri PONTET, militant syndical. Ils sont internés à Nexon. Les sanctions sont tombées très rapidement.
Antoine BERNADAT connaîtra les camps de Nexon et de Saint Paul d’Eyjeaux d’où il sera libéré en février 1943. Il sera placé en résidence surveillée pendant 3 mois avant de revenir travailler à la mine.
Henri PONTET connaîtra, comme BERNADAT, les camps de Nexon et de Saint Paul d’Eyjeaux. Lors d’une permission, qui lui avait été accordée pour l’enterrement de son beau-père, il rejoindra la Résistance. Il est arrêté à Saint Etienne, par la milice, au mois de mai. Il connaitra les prisons de Saint Etienne, Saint Paul à Lyon et le camp de concentration de Dachau où il décède, le 25 septembre 1944.

Les mineurs vont continuer la résistance et entrer dans les maquis. Le 8 août 1944, huit mineurs de Saint-Hilaire seront tués à la bataille de Bouillole :
DOBROWOLKI Stanislas 17 ans
GUICHON Marcel 20 ans
MUSKI Micezlaw 20 ans
RULMANN Roger 20 ans
WUKA Antoine 48 ans
RANOUX Jacques 18 ans
COTAKIS Elian 20 ans
ISNARD Jean 19 ans

Comme dans les mines de l’Allier, d’autres mineurs ont fait la grève pendant cette période, comme dans le Nord de la France.
Voici le témoignage de Roger LHOMMET sur la grande grève de 1941, adressé au Patriote Résistant.
« Le 3 juin toutes les concessions du Pas-de-Calais sont en grève. La grève est totale et se développe dans le département du Nord.
« Le 4 juin, une manifestation, regroupant 1500 femmes, devant le grand bureau des mines de Courrières à Billy-Montigny, réclame un meilleur ravitaillement, les Allemands de la Feldkommandantur de Lens interviennent et repoussent les manifestantes.
« Le 8 juin, au lever du jour, une auto s’arrête devant notre domicile, la police française et les Feldgendarmes tapent dans la porte. Réveillés, ma sœur et moi alertons nos parents qui se lèvent. Mon père arrive à s’enfuir, ma mère est arrêtée. Toute la journée, des mineurs sont appréhendés chez eux, mon oncle, des voisins, conduits dans des camions bâchés à la caserne Kléber à Lille et à la caserne Vincent de Valenciennes. Pour le département du Pas-de-Calais, plusieurs centaines de mineurs sont arrêtés ainsi qu’une quarantaine de femmes, épouses de militants ou militantes elles-mêmes. Elles furent libérées le 21 juin, veille de l’entrée des troupes allemandes en U.R.S.S.
Pour certains historiens, cette grève n’est pas un acte de résistance. Mais, arrêter la production de charbon, n’était-ce pas nuire à l’économie de guerre de l’Allemagne.
Il en est de même pour ceux qui imprimaient les tracts, journaux et les distribuaient.