mercredi 13 décembre 2006

En France après la déclaration de guerre

Le 3 septembre, jour où la France entre en guerre, DALADIER institue, par décret, « des centres de séjours surveillés ».

26 septembre, le gouvernement DALADIER dissout le parti communiste qui n’a pas dénoncé le pacte germano-soviétique.

18 novembre, le gouvernement étend aux citoyens français les mesures appliquées aux étrangers indésirables : l’internement.

LA DROLE DE GUERRE

Depuis la déclaration de guerre à l'Allemagne, en septembre 1939, se déroule ce que les Français appellent « la drôle de guerre ». Après la déclaration de guerre, les grandes sociétés sidérurgiques lorraines continuent d’expédier en Allemagne des trains de minerai de fer.

Le frère d’André LECOURT, Clément HABAS, né en 1914 et dont le père a été tué à la guerre 14-18 est mobilisé, quelques mois avant la déclaration de guerre. Après la déclaration de guerre, il est cantonné à Forbach, près de la frontière. Il écrit à sa famille : « Ici nous restons l’arme au pied sans rien faire ; les Allemands, en face, sont comme nous, l’arme au pied. On ne fait pas la guerre ! Pire même, des trains chargés de minerai de fer traversent la frontière en direction de l’Allemagne ».
[1]
Louis FORT, de Lafeline, soldat dans la 133ème D.I., vient en permission pour Noël 1939. Dans le car qui le ramène chez lui, il parle de sa vie dans l’armée, de cette drôle de guerre. Il dit qu’il serait mieux chez lui qu’à faire le zouave dans l’armée. Une personne, qui se trouve dans le car, va rapporter ses paroles aux autorités. Il est arrêté pour propos défaitistes et atteinte au moral de la nation, il passe devant le tribunal militaire qui le condamne à 6 ans de prison. Le 27 décembre 1939, il est emprisonné à la centrale de Clairvaux. Le 13 juin, lors de la débâcle, il revient chez lui où il arrive le 23 juin 1940. Il y demeurera jusqu’au 26 juillet où il est de nouveau arrêté et interné à la centrale de Riom. Il profitera de ce court séjour à Lafeline pour ramasser, avec des camarades, des armes abandonnées et constituer un dépôt composé de 27 fusils lebel ou mousquetons et 3 fusils-mitrailleurs Le 19 novembre 1942, il bénéficie d’une mise en liberté provisoire et rentre chez lui. Le 1er décembre 1942, il est démobilisé.[2]
Pendant le temps passé dans les prisons, il a noué des relations avec de hauts responsables de la direction du parti communiste. Sa maison sera un lieu de passage et de repos pour nombre d’entre eux après sa libération (tel le député de Roanne).
[3] Résistant, il va former, avec son fils Roger, responsable des J.C. puis des jeunes de l’U.J.R.F., des groupes de F.T.P. sédentaires et trouver des planques pour les réfractaires au S.T.O. [4]
La gestapo va l’arrêter, le 22 janvier 1944, ainsi que sa femme, son fils Roger et un réfractaire au S.T.O. qui avait trouvé refuge chez lui, Georges BOURRIENNE. Après des interrogatoires musclés, son internement dans la prison de La Mal-Coiffée à Moulins et au camp de Royallieu, lui et son fils Roger partiront, le 12 mai 1944, par le convoi n° 211 pour Buchenwald. Ils connaîtront le camp de Gunzerode, dépendant du commando d’Ellrich. Au cours de l’évacuation du commando, en gare de Meistre, ils sont séparés. Louis sera libéré à Bergen-Belsen, le 15 avril 1945, par l’armée anglaise. Roger est porté mort à Meistre. Roger va poursuivre sa route vers la grange de Gardelegen où 10012 déportés ont trouvé la mort.
Georges BOURIENNE sera muté à Mauthausen où il trouvera la mort en décembre 1944.
Germaine, sa femme, est déportée à Ravensbrück, le 13 mai 1944, par le convoi n°212. Elle est libérée le 9 avril 1945, par la Croix Rouge et sera, pendant de nombreuses années, responsable de la section de Saint-Pourçain-sur-Sioule de la F.N.D.I.R.P.
[5]
Après la dissolution du parti communiste, la majorité des députés communistes refusent de désavouer le pacte germano-soviétique et créent, en toute légalité un groupe parlementaire appelé « groupe ouvrier et paysan » ouvert à tous ceux qui acceptent le programme élaboré par GUESDE pour le parti ouvrier français, en 1880.
Le 30 novembre, Florimond BONTE, qui a tenté de prendre la parole à la chambre des députés, est arrêté dans l’hémicycle, en violation de son immunité parlementaire.




1940
Le 16 janvier, Etienne FAJON, qui est à l’armée, obtient une permission. Il réussit à prendre la parole au nom du groupe « ouvrier et paysan » lors de la discussion du projet de loi sur la déchéance des députés de ce groupe.
Le vote de cette loi permet l’arrestation et l’emprisonnement, en toute légalité, des députés communistes, qui ne sont plus couverts par leur immunité.
« J’ai le sentiment que la majorité de notre parti trouvera la dissolution du parti communiste naturelle et légitime » écrit le socialiste Léon BLUM dans le Populaire.
[6]

Le 20 mars, le gouvernement publie un tableau de chasse de novembre 1939 au 7 mars 1940 : 620 syndicats dissous, 11 000 perquisitions effectuées, 800 militants recherchés ont été arrêtés, 10 000 sanctions sont prises contre les fonctionnaires communistes.
Le 20 mars, 44 députés qui sont restés fidèles à leur parti sont jugés par la 3ème chambre du Tribunal Militaire Permanent de Paris sous l’inculpation d’avoir, par des démarches, propagé les mots d’ordre émanant ou relevant de la 3ème internationale communiste.
Ils sont condamnés à 5 ans de prison. Pour eux, va commencer le tour des prisons de France qu’ils vont effectuer, à pied, enchaînés comme des assassins ou dans des paniers à salade, situation très pénible car ils sont à deux dans la cellule faite pour un, un assis et l’autre debout et impossibilité de se retourner. C’est cette souffrance que connurent les femmes communistes internées à la Petite Roquette qui furent évacuées, lors de l’exode à Bordeaux, dans les « paniers à salade ».
[7]
Le voyage, à travers les prisons de France, va se terminer, pour 27 députés communistes, à celle du Puy-en-Velay (Haute-Loire). Ils quitteront cette prison pour le bagne de Maison-Carrée, à Alger (Afrique du Nord).
[8]
Ne pouvant plus s'exprimer publiquement, après l’interdiction de leurs journaux, le Parti Communiste commence à diffuser sa presse, sous le manteau.
Les élus, maires et conseillers municipaux, qui ne font pas allégeance au gouvernement, en désavouant le pacte germano-soviétique, sont démis de leurs mandats. Ce sera le cas pour les municipalités de Saint-Hilaire et de Saint-Plaisir qui sont remplacées par des délégations spéciales, le 20 mars 1940. De nombreuses autres municipalités progressistes connaîtront le même sort.
[9]
Le décret-loi du 28 novembre 1939, qui permet aux préfets de faire interner les individus qu’ils jugent dangereux pour la défense nationale et la sécurité publique, va être largement utilisé contre les communistes.
Ce décret-loi sera aggravé par la loi, dite « Loi SEROL » d'avril 1940, qui punit de mort ceux qui sont accusés de menées communistes ou de reconstitution de ligues. Les juges professionnels se montrant réticents à prononcer de très lourdes peines, les communistes seront déférés devant les tribunaux militaires.

Pour faire face à cette répression qui s’abat sur les élus, responsables communistes et syndicaux, la direction du parti décide de faire passer dans la clandestinité ceux qui sont les plus menacés d’arrestation.

La débâcle
En mai 1940, l'attaque allemande jette sur les routes de France toute une population. Aux civils se mêlent les soldats de l'armée française en déroute. Ceux-ci se débarrassent de leurs armes, devenues inutiles, en les abandonnant le long des routes.
Devenu Premier Ministre du gouvernement replié à Bordeaux, PETAIN demande, le 17 juin, l’Armistice qu’il signera le 22 juin avec l'Allemagne, puis le 27 avec l'Italie. L’Armistice est accueilli avec soulagement par la population, mais les anciens combattants de 14-18 sont traumatisés. Ils se demandent pourquoi tant de sacrifices et de souffrances devraient être oubliés. Le sacrifice de millions de morts et d’estropiés de 4 années de guerre était-il inutile ?

La France éclatée
D’après les conditions de l’Armistice signé par PETAIN :
- l'Alsace et la Moselle redeviennent provinces allemandes,
- au nord, une partie de la France est rattachée à la Belgique,
- au sud-est, une autre est rattachée à l'Italie,
- une zone interdite, profonde de 30 kilomètres, couvre toute la façade atlantique, de Dunkerque à Hendaye.
- l’espace restant est partagé en 2 zones, séparées par une nouvelle frontière, appelée « ligne de démarcation ».

L’Allier, département partagé
La ligne de démarcation coupe en deux le département de l'Allier. A Moulins, la ville sur la rive droite de l’Allier est en zone occupée tandis que le faubourg de la Madeleine, sur sa rive gauche, est en zone dite « libre », expression créée par PETAIN. L’armée allemande contrôle le passage du pont Régemortes qui ne se franchit qu’avec un laissez-passer délivré par les autorités allemandes.
[10].
Les Allemands prennent possession de la prison, « La Mal-Coiffée ». Ils éliminent progressivement les gardiens français, les remplacent par leurs gardiens. Ils vont en faire la seule prison entièrement allemande dans la France occupée.
[11]
[1] (archives personnelles)
[2] (Archives ONAC)
[3] (témoignage Lucien DEPRESLES)
[4] (archives ONAC)
[5] livre mémorial Georges BOURIENNE partira par le convoi 199 du 6 avril 1944 pour Mauthausen, kommando de Gusen où il décède le 04/02/1945 selon le livre

8 (André TOLLET ) la classe ouvrière dans la Résistance page 47).
9 Fernand GRENIER C’était ainsi
10 (déportation en Afrique du Nord)
[9] (archives personnelles)
[10] photocopie laissez-passer
[11] la seule en France